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Persistance, vous avez dit persistance ?

Ecrit par Pierre-Antoine Favre le 10 novembre 2009 Aucun commentaire
Persistance, vous avez dit persistance ?

Les MMO s’incarnent dans une très grande diversité de titres qui flirtent parfois avec les limites de la définition du genre. Là où le caractère réellement multijoueurs d’un jeu peut être contesté, c’est surtout la notion de persistance qui est mise en débat. Retour sur cette dimension centrale des univers virtuels.

Au cœur de la définition d’un MMO

Le site JeuxOnline nous donne la définition des MMO :

  • Les MMORPG ne sont accessibles qu’en ligne sur Internet. Le joueur est invité à rejoindre un monde virtuel, sur Internet, en se connectant à un serveur de jeu ;
  • Ils sont dits “massivement multijoueurs“, c’est-à-dire qu’ils font cohabiter des millions de joueurs dans un même monde virtuel répartis sur des serveurs accueillant entre 3000 et 5000 joueurs par serveurs ;
  • Longtemps considéré comme le critère le plus déterminant, les MMORPG prennent la forme d’un univers dit “persistant”, c’est-à-dire accessible en permanence et en perpétuelle évolution autonome, que le joueur y soit connecté ou non.
  • Le premier principe, “en ligne sur Internet”, ne fait pas débat tant il est incontournable. Son intangibilité n’est cependant pas transposable aux autres éléments de la définition.

    Pluralité du genre

    Nous laissons là encore le soin à JeuxOnline d’évoquer le phénomène :

    Au fil du temps, cette définition des MMORPG a néanmoins été tempérée au fur et à mesure des sorties. Le développement technologique, les innovations ludiques ou encore le comportement des joueurs font évoluer le genre (aux côtés des traditionnels MMORPG, aujourd’hui, les MMOFPS, les MMORTS et autres CORPG se multiplient).

    Même s’ils sont tous toujours jouables en ligne, la persistance des MMOG est parfois discutable (et discutée) du fait de la généralisation des systèmes “d’instances” (c’est-à-dire le fait de générer une zone temporaire, non persistante, dans des circonstances de jeu particulières). Les mécanismes d’instances mettent pareillement à mal le caractère massivement multijoueur des MMOG. Il est en effet possible de jouer en petit comité (entre amis soigneusement sélectionnés), voire même seul avant de pouvoir croiser d’autres joueurs…

    Dans un article précédent, MMOFPS et MMORTS, le concept MMO dans tous ses états, nous évoquions la diversité des titres associés au genre des MMO.

    Des jeux récents témoignent de variations supplémentaires, tels Cities XL (gestion d’une ville dans un monde persistant) ou bien Fuel (jeu de course à travers une carte géante, à la frontière du MMOG). Deux jeux français (que nous devons aux studios Monte Cristo Multimédia et Asobo respectivement) où l’aspect communautaire accompagne la possibilité de jouer dans un monde ouvert, même si le concept s’éloigne du MMO au sens traditionnel.

    La notion de persistance en débat

    Le procédé de l’instance (zone temporaire, réservée à un nombre limité de joueurs) s’oppose par nature au principe de persistance. Inauguré avec Anarchy Online (sortie en France en 2001), il a été très largement repris et les arguments en sa faveur sont bien connus :

  • Argument technique : la gestion des regroupements de joueurs constitue un défi technique ardu pour les développeurs. Les instances offrent de pouvoir fractionner la gestion serveur de l’espace de jeu et d’éviter le rassemblement intempestif d’un trop grand nombre de joueurs au même moment et au même endroit.

    De plus, une éventuelle défaillance du serveur qui gère une instance n’entraîne pas la mise en arrêt de l’ensemble de l’univers. Il en résulte un gain de stabilité très appréciable.

  • Argument de gameplay : le recours aux instances permet de calibrer la difficulté de l’expérience des joueurs en PvE ; en PvP, les instances permettent d’équilibrer les confrontations (arènes et champs de bataille dans WoW) par un nombre de participants similaire des deux côtés.

    Ce n’est donc pas une surprise si nous assistons à une généralisation massive du système des instances (sous une forme directe ou bien détournée comme au travers du phasing) dans la plupart des MMO.

  • Bien commode pour les développeurs sur le plan technique, il offre aussi de pouvoir réaliser toutes les audaces en matière de gameplay. Pour proposer une aventure vidéoludique intense, le contrôle des éléments de jeu y est en effet beaucoup plus aisé que dans un monde ouvert où le comportement des joueurs (déplacements, actions…) est plus délicat à anticiper et à encadrer.

    Paradoxe : devenu un outil dont raffolent les développeurs pour créer de la nouveauté dans les MMO et même pour envisager des concepts de jeu inédits, les instances contreviennent parfaitement au principe de persistance.

    Point de passage obligé par manque de réelle alternative sur le plan technique ? Ou bien supercherie intellectuelle qui consiste à nous faire prendre les vessies de concepts soi-disant révolutionnaires pour des lanternes ?

    Car s’il n’est pas interdit de proposer des jeux qui s’éloignent de la définition originelle des MMO, force il est de constater que les joueurs restent bien souvent sur leur faim face à des titres qui se suivent et se ressemblent, même si la forme peut varier.

    Catégorisation du caractère persistant

    La meilleure manière de démêler l’écheveau de la discussion sur la persistance dans les MMO reste encore d’en éclaircir les différents degrés. Car la persistance peut en effet s’articuler sur plusieurs niveaux que nous illustrons ici :

    Détaillons plus avant ce schéma :

  • Permanence : c’est l’aspect le plus immédiat et le plus évident de la persistance d’un univers virtuel. Lorsque vous quittez le jeu et que vous y revenez, l’univers est encore là ! En dehors des éventuelles heures de maintenance, il est en ligne 24h/24h. Tandis que vous n’êtes pas connecté, d’autres joueurs sont présents en jeu, si bien que celui-ci ne s’arrête jamais.
  • Évolutivité : la permanence est une chose, l’évolutivité en est une autre. Elle permet de passer d’un monde granitique, sans changement, à un monde en mouvement. Pour autant, un monde évolutif relève souvent d’une véritable gageure pour des raisons techniques (une base de données dynamiques doit gérer les changements d’état des objets), économiques (un élément doit être conçu selon plusieurs états par les développeurs, le budget n’en est que plus élevé) ou de gameplay (comment deux joueurs peuvent-ils interagirent avec le même objet en même temps ?).

    Même si elle correspond à une amélioration sensible, l’évolutivité ne signifie pas nécessairement que c’est le joueur qui est à l’origine d’une modification. Il peut en résulter une certaine frustration de la part du joueur à laquelle il convient de remédier.

  • Phasing : une solution réside dans « l’instanciation » du contenu ou même le phasing.
    Grâce au phasing, un joueur seul ou en petit groupe peut avoir la sensation d’avoir un impact sur l’évolution du monde virtuel au travers d’une quête qui lui accorde de pouvoir transformer son environnement.

    Cette solution à la fois technique et narrative (autrement, comment mettre en œuvre un procédé de narration interactive dans un contexte massivement multijoueurs ?) a été mise à profit dans la deuxième extension de World of Warcraft, Wrath of the Lich King, comme à travers ces exemples.

    Le MMO de BioWare à paraître, Star Wars: The Old Republic, envisage de faire un usage intensif du phasing par l’intermédiaire de quêtes dédiées. L’avantage est de pouvoir parfaitement calibrer l’expérience des joueurs, renforcer l’aspect narratif, grâce à un contenu scripté.

  • Plasticité : deux inconvénients subsistent avec le phasing. Par son caractère instancié tout d’abord (lequel contrevient à la notion de permanence et donc de persistance) ; par l’évolution limitée à la seule zone instanciée et aux joueurs qui y sont présents, ensuite. Les transformations apportées par un joueur perdent de leur saveur si elles ne sont visibles que de lui-seul et pas des autres joueurs.

    Le degré ultime de l’évolutivité d’un monde synthétique serait donc non seulement que les joueurs puissent avoir un impact sur celui-ci, mais mieux encore, qu’ils puissent être les témoins collectifs des transformations dont ils sont à l’origine. En somme, par le concept de plasticité, il faut comprendre que les joueurs partagent réellement le même univers et peuvent agir directement sur lui. Le résultat de leurs actions s’inscrit lui-même dans une certaine permanence.

  • La communauté, encore et toujours

    Au-delà de la persistance de l’avatar ou de celle de l’univers, il reste un élément de persistance non évoqué et pourtant fondamental dans un univers virtuel : la communauté.

    C’est elle qui rassemble les joueurs, elle qui peut les convaincre de rester dans un jeu malgré ses faiblesses de gameplay, elle qui peut inciter des joueurs à rejoindre leurs amis. Elle au final qui permet de consacrer le caractère persistant d’un univers au-delà de sa définition technique incarnée à travers la permanence de l’avatar ou de l’univers.

    Avant de voir des mondes imaginaires à la plasticité réelle, transformables à volonté par les joueurs, la communauté est ce qui s’en rapproche le plus. Une guilde par exemple évolue sans cesse, sous l’influence directe des actions et décisions de ses membres. Elle reproduit une vraie plasticité sociale là où la plasticité de l’univers de jeu fait défaut.

    Pour les promoteurs d’un MMO, il reste toujours la lancinante question de savoir combien de temps la plasticité de l’aspect communautaire peut pallier au manque d’attrait d’un univers de jeu trop figé ?

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